Mouvement d’éducation populaire à la mémoire partagée depuis 1998

BORDEAUX – BAYONNE – DAKAR – LA ROCHELLE – LE HAVRE – PARIS

BORDEAUX – RAFLE DE 365 JUIFS, la Fondation du Mémorial a participé au 70eme anniversaire et salue le discours républicain du Préfet/ 12 janvier 2014

 

Dans un contexte de crispations autour d’un regain d’anti-sémitisme, il est important que tous les acteurs se mobilisent pour faire oeuvre de partage de toutes les humanités brutalisées sacrifiées par l’histoire. Sans exclusive ni partialité.

Le Président de la Fondation du Mémorial était présent à cette commémoration organisée par le Consistoire Israélite de Bordeaux pour exprimer sa vigilante solidarité et la mémoire partagée à l’égard de tous les crimes que la barbarie humaine aura perpétré, avec l’aveuglement et la complicité des puissants qui jamais n’auront réussi à déshumaniser des peuples conscients que ni les haines ni les divisions ne sont porteuses d’espérances ».

La Fondation salue le discours du Préfet d’Aquitaine (ci-dessous) qui s’est fait le garant de la liberté d’expression, qui a fermement condamné toutes les dérives racistes et antisémites et affirmé la détermination de la République à célébrer toutes les mémoires notamment la traite des noirs.

Pour rappel, cet anniversaire commémore la rafle du 10 janvier 1944, où 365 juifs de Bordeaux et de la région avaient été regroupés à la synagogue avant d’être déportés vers Drancy puis vers les camps de la mort. Ce fut la dernière rafle ; d’autres l’avaient précédée dès 1942 avec le feu vert des autorités françaises. Ce fut la rafle dont s’échappa le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, alors âgé de 6 ans, qui reviendra dans sa ville natale à l’occasion des commémorations organisées par le Consistoire israélite.

COMMÉMORATION DE LA RAFLE DU 10 JANVIER 1944

 Allocution de M. Michel DELPUECH,

Préfet de la région Aquitaine, Préfet de la Gironde

Synagogue de Bordeaux

Dimanche 12 janvier 2014

 Le 10 janvier 1944, au petit matin, à Bordeaux et dans dix-sept communes de la région –Bayonne, Pau, Arcachon, Libourne- trois cent soixante-cinq hommes, femmes et enfants, parce qu’ils étaient juifs, furent arrêtés à leur domicile, puis regroupés et enfermés ici, en cette synagogue cyniquement transformée en lieu de détention, avant d’être transférés le 13 janvier vers le camp de Drancy, puis déportés à Auschwitz pour être exterminés.

Ce matin nous honorons la mémoire de ces martyrs, nous nous recueillons avec émotion et  respect en songeant à leurs souffrances indicibles, et nous associons à notre hommage toutes les victimes de la Shoah, toutes les victimes de la barbarie nazie.

C’était il y a soixante-dix ans. Que de chemin parcouru depuis : la Libération de notre pays, la capitulation du IIIème Reich, la déclaration universelle des droits de l’Homme, l’amitié franco-allemande, la construction européenne, la condamnation des criminels nazis et de leurs complices, le progrès des démocraties, partout en Europe.

Et pourtant, soixante-dix ans après, l’actualité vient de nous rappeler que l’antisémitisme et le négationnisme trouvent encore dans notre pays de sinistres porte-paroles qui distillent la haine, le mensonge et le mal sous-couvert de spectacle humoriste.

La République ne pouvait davantage tolérer que ses valeurs fûssent ainsi bafouées.

Sous l’autorité du Président de la République, le Ministre de l’Intérieur et l’ensemble du Gouvernement ont su trouver, avec les autorités préfectorales, la réponse juridique, validée par le Conseil d’État.

L’exercice de la liberté d’expression est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés, rappelle la haute juridiction.

Cependant, ajoute-t-elle, l’autorité de police peut légalement interdire un spectacle qui contient des propos de caractère antisémite, qui incitent à la haine raciale et font, en méconnaissance de la dignité de la personne humaine, l’apologie des discriminations, persécutions et exterminations perpétrées eu cours de la deuxième guerre mondiale.

Le Droit est ainsi dit et je l’appliquerai sans faiblesse, dans la droite ligne des instructions du Ministre de l’Intérieur.

Mais la réponse à porter aux dérives n’est pas qu’affaire de droit et de police administrative.

L’ignorance et l’inculture offrent un terreau propice à l’écoute de l’inacceptable. Transmettre la mémoire, aider les générations d’aujourd’hui et de demain à connaître et comprendre l’Histoire sont plus que jamais des nécessités pour notre cohésion nationale.

Et il faut mettre fin aux ambiguïtés et amalgames. Toutes les histoires, toutes les tragédies doivent être reconnues et respectées. La traite négrière en fut une, et notre pays y consacre une journée commémorative. Mais la concurrence des mémoires est dangereuse. Elle dresse les uns contre les autres ; elle divise ; elle oppose ; elle attise la haine et nourrit l’esprit de vengeance. Elle tourne le dos à notre conception républicaine de la citoyenneté ; elle met à mal nos principes d’égalité, de liberté, de fraternité.

Le 7 janvier dernier, dans son discours de vœux aux corps constitués le Président de la République déclarait : « Face à toutes les atteintes aux principes de la République, face au racisme, face à l’antisémitisme, face aux troubles à l’ordre public que suscitent des provocations indignes, face aux humiliations que représentent les discriminations, je demande aux représentants de l’État -en particulier aux préfets- d’être vigilants et inflexibles ».

Je veux vous assurer, toutes et tous, que j’inscris fidèlement mes pas dans la voie ainsi tracée et que ma détermination, sur ces sujets, est totale.

Je demande aux services de police et de gendarmerie de renforcer leur vigilance pour constater tout ce qui doit l’être et permettre à la Justice de la sanctionner.

Je demande hauteur de vue et bon sens dans les actions que nous menons ensemble, État, collectivités, associations, pour favoriser l’intégration de tous les jeunes et leur donner toutes leurs chances dans notre société. La générosité que nous leur devons n’est pas incompatible avec l’exigence républicaine, et elle peut s’exprimer autrement qu’en distribuant des billets gratuits pour un spectacle dont on connaît aujourd’hui le sens.

Enfin, il faut que nous soyons engagés avec autant de force et de conviction dans la lutte contre les discriminations que nous devons l’être dans la lutte contre l’antisémitisme et toutes les formes de racisme. C’est ainsi que la République tiendra sa promesse, et c’est ce que je rappellerai en réunissant prochainement la commission pour l’égalité des chances et la citoyenneté (COPEC).

˜Un lien particulier unit la communauté juive à l’Histoire de notre pays, à l’esprit des Lumières, à 1789, à l’œuvre de laïcité et d’égalité de nos Républiques, à l’esprit de justice et au patriotisme -Dreyfus, Léon Blum, Georges Mandel-.

Chaque samedi matin, dans toutes les synagogues, vous priez pour que la France « conserve son esprit de Noblesse parmi les nations ».

L’État laïc n’a pas à exaucer une prière. Mais nous savons, ensemble, que ce sont les valeurs de la République qui sont le souffle et la force de cet esprit de noblesse, et que ces valeurs, comme vient de le montrer le Gouvernement, seront toujours plus fortes que ceux qui les piétinent.

Vive la République !

Vive la France !

 

 

 

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