Inaugurée le 6 décembre, l’exposition Mémoires d’enfances exilées, l’histoire des enfants dits de la Creuse de la photographe Corinne Rozotte est présentée à l’Hôtel de région Nouvelle-Aquitaine.
A quelques jours de la Fét Kaf (173e anniversaire de l’abolition de l’esclavage à la Réunion), Mémoires & Partages, engagée dans le travail de mémoire et de réparation sur les déportations et exploitations d’africain.e.s par des Néo-Aquitains, se réjouit de cette exposition qui sort de l’ombre cette histoire méconnue.
Pour Karfa Sira Diallo, fondateur-directeur de Mémoires & Partages, cette exposition « répare un terrible oubli né du dogme colonial et racial qui a prévalu en France bien après l’abolition de l’esclavage auquel les populations ultramarines ont été soumises. C’est de notre responsabilité d’inscrire les drames vécus par ces concitoyens au coeur de notre histoire, pour saluer leurs capacités de résistance mais aussi pour envisager la nécessaire réparation des conséquences de cette histoire par la transmission de cette mémoire mais aussi par des mesures concrètes en faveur de leurs descendants…»
L’EXPOSITION
La photographe Corinne Rozotte présente ses portraits sous forme de diptyques : « un portrait classique de la personne avec un élément de décor qui a trait à son enfance. » Un travail émouvant pour Valérie Andanson, présidente de la FEDD. « On voit dans nos regards que même si on a réussi à obtenir plusieurs choses (une plaque à Orly va être déposée, un lieu de ressource sera créé à Guéret ainsi qu’à La Réunion, l’histoire des enfants de la Creuse sera intégrée dans les manuels scolaires…), il y a quand même un traumatisme. » Valérie Andanson souhaite que cette exposition fasse passer un message, à travers ces images et témoignages.
L’HISTOIRE
Entre 1962 et 1984, on estime qu’au moins 2150 mineurs réunionnais relevant de l’aide sociale à l’enfance (ASE) ont été envoyés en métropole dans 83 départements frappés par l’exode rural, dont 215 enfants en Creuse. Déclarés pupilles de la nation, certains avaient en réalité des parents à qui les services sociaux ont fait signer des déclarations d’abandon, profitant de leur pauvreté et de leur illettrisme. Apprentis ou employés, ouvriers agricoles, boulangers, femmes de ménage, certains de ces enfants sont exploités et maltraités pendant des années. L’affaire, restée méconnue du grand public pendant longtemps, éclate en 2002 après une plainte d’un de ces « enfants de la Creuse », Jean-Jacques Martial.
3 réponses
J’ai entendu parler de ce scandale humain, voici quelques années. Des téléfilms, des débats, ont évoqué le sujet. Cette infamie prouve tout simplement que des citoyens français subissaient, encore au vingtième siècle, un infantilisme outrageux et une intolérable discrimination dus à la couleur de leur peau, et que tout n’est pas encore réglé. La confiance ne peut s’établir que dans l’égalité de traitement. Le chemin est encore long, mais, j’ai bon espoir.
Le cas des « Enfants de la Creuse » (et d’autres départements) exilés depuis la Réunion n’est pas isolé. D’autres pays ont pratiqué ce genre de déplacement forcé de populations et d’enfants. Les historiens documentent aujourd’hui largement ce genre de migrations forcées où les bonnes intentions affichées couvraient des intérêts moins avouables et des abus condamnables : https://diacritiques.blogspot.com/2014/02/enfants-voles-et-lois-memorielles.html
Merci pour le lien Web M. Coste.