Deux mois après la municipalité du Lamentin en Martinique, c’est la ville de Charlottesville qui a procédé ce samedi 10 juillet au déboulonnage de deux statues objets de vives polémiques depuis plusieurs années.
En 2017, militants antiracistes et suprémacistes blancs s’y étaient affrontés alors que le maire de la ville ait décidé de déboulonner la statue du général confédéré Robert E. Lee suite à une pétition lancée en 2016 par Zyahna Bryant, une jeune lycéenne noire de la ville.
Une bataille judiciaire menée par des opposants au déboulonnage avait abouti à des rassemblements organisés par des suprémacistes qui ont dégénéré le 13 aout 2017 lorsqu’un automobiliste a foncé sur une jeune femme activiste de 32 ans entrainant sa mort et blessant de nombreuses personnes.
Un symbole du Black Lives Matter
Alors que le mort de George Floyd en 2020 a redonné un nouveau souffle au mouvement contre les violences policières, que la justice américaine vient de prendre une décision historique condamnant le policier coupable de ce meurtre et que le nouveau président Joe Biden a placé son mandat sur le terrain des droits civiques, ce déboulonnage annoncé et exécuté par le conseil municipal de Charlottesville vient parachever une intention politique contrariée par des suprémacistes jadis soutenus par l’ancien président Donald Trump qui avait renvoyé dos à dos les belligérants.
Ce samedi, une grue actionnée par des agents de la mairie ont enlevé les deux statues statues en bronze des généraux confédérés Robert E. Lee, figure de la guerre de Sécession, et de Thomas « Stonewall » Jackson.
Pour la maire de la ville, Nikuyah Walker, qui s’est exprimée avant le début des opérations « Retirer cette statue représente un petit pas vers l’objectif d’aider Charlottesville, la Virginie et l’Amérique à se confronter au péché que représente le fait d’avoir été jusqu’à détruire des personnes noires pour des profits »
Alors qu’en France, le président Emmanuel Macron, qui continue de soutenir que « La France ne déboulonnera aucune statue », est désavoué par le déboulonnage décidé par la ville du Lamentin le 29 mai dernier, cette décision américaine relance un débat sur la justice urbaine qui est loin d’être terminé.
Une réponse
Robert Edward Lee, dont la légende dorée voudrait qu’il ait été contre l’esclavage et qu’il fût un brave et magnanime soldat bien que fasciné par la guerre. Thomas Jonathan Jackson, surnommé « Stonewall » lors d’une fameuse bataille car stoïque comme un mur de pierre face à la mitraille, fut, lors d’un autre engagement, mortellement blessé et il aurait alors prononcé cette belle phrase avant de succomber, que je cite de mémoire et sans garantie de complète exactitude : « traversons la rivière et allons nous rafraichir à l’ombre des frondaisons ». Ils furent, tous deux, hommes de leur temps avec les préjugés de cette époque, bien loin de tout le romantisme que l’iconographie véhicule, ni meilleurs ni pires que l’exalté mystique John Brown (dont Lee fût à l’origine de la chute) ou du capitaliste ou citoyen nordiste dont la grande majorité se foutait éperdument de la condition des esclaves ; le grand Lincoln lui-même n’avait qu’un but : sauver l’Union « quoi qu’il en coûte ». Tous ces gens justifiant leurs actes au nom de Dieu, qui, en cas d’existence, devrait également répondre de son laxisme criminel. Cela dit, il est juste et bon que ceux qui ont soutenu une économie qui avait pour assises l’insupportable servilité des êtres humains aient leurs effigies détrônées des agoras et reléguées dans des musées où la mémoire de ce qu’ils furent est, elle, conservée.