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BORDEAUX – BAYONNE – DAKAR – LA ROCHELLE – LE HAVRE – PARIS

LA QUESTION DES RUES DE NÉGRIERS- Le Député Loic Prud’homme prend position…

Par courrier adressé à Mémoires & Partages, le député de la France Insoumise demande à Bordeaux « d’accepter son passé négrier à la hauteur de ce qu’il fut.  »

Député de la 3eme circonscription de la Gironde, Loïc Prud’homme a tenu à nous exprimer son point de vue à la veille de la dernière étape bordelaise du plaidoyer sur les rues de négriers, ce 19 février.


Loïc Prud’homme                                                                                 

Député de Gironde

                                                                 Villenave d’Ornon, le 16 février 2018

Je salue le travail des membres de l’association « Mémoires et partages » qui fait depuis 20 ans un remarquable travail de fond pour sensibiliser à la mémoire de l’esclavage et la traite des noirs à Bordeaux. Ce travail indispensable a contribué à ce que le 10 mai 2001 soient reconnus à l’unanimité l’esclavage et la traite des noirs comme des crimes contre l’Humanité.

Il était temps, car la traite négrière atlantique du XVIIIème siècle ce sont 54 200 traversées ayant acheminé 13 000 000 captifs, dont 11 328 000 arrivèrent à destination. Bordeaux est à l’origine de la déportation de près de 150 000 esclaves noir.e.es entre 1672 et 1837. Avec 508 expéditions, Bordeaux se place en deuxième position des ports français pour l’ensemble de la période concernée.

Ce commerce a meurtri des chaires mais il a aussi façonné notre ville et certaines rues en portent encore les traces comme autant de cicatrices d’un passé peu glorieux. Elles ne manquent pas à Bordeaux : Place Lainé, Cours Balguerie, Cours Portal, rue David Gradis, rue Gramont, rue de la Béchade, rue De Bethman, rue Desse, Place Mareilhac, Cours Journu-Auber, Place Ravezies, rue Daniel Guestier, Place John Lewis Brown, rue De Kater, Place Johnston, rue Fonfréde et rue Baour. Tous ces noms honorent la mémoire des armateurs de bateaux négriers ou de propriétaires de plantations où travaillaient des esclaves jusqu’à l’épuisement.

Ces cicatrices, rien ne sert de les masquer, il est au contraire urgent de savoir qu’elles sont là et pourquoi. « Simplement » débaptiser les rues n’est donc pas la solution pour connaître notre passé car cela efface la trace, sans expliquer. La démarche de l’association Mémoires et Partages qui propose de poser des plaques explicatives « pour rappeler la complexité de ces personnages éponymes » est dans ce sens la plus efficace pour sensibiliser le plus grand nombre et pour simplement rétablir la vérité historique.

Cette initiative serait bienvenue dans cette ville pour qu’elle commence à accepter son passé négrier à la hauteur de ce qu’il fut. Comment imaginer que les citoyen.ne.s, les touristes de passage ou les étudiants en quête d’information puissent connaître cette histoire sans cette démarche ? Aujourd’hui leur seul recours est de pousser la porte du musée d’Aquitaine. Nous ne pouvons nous contenter de cela.

Merci donc à l’association Mémoire et partages pour cette initiative et à toutes celles et ceux qui par leur engagement luttent contre l’oubli et réveillent les consciences.

Villenave d’Ornon, le 16 février 2018

Loïc Prud’homme, Député de Gironde


Pour Karfa Diallo, fondateur-directeur de Mémoires & Partages,

 » C’est la première fois qu’un député de la France métropolitaine prend position publiquement sur cette question délicate de la signalétique urbaine. Le refoulement de la question de l’esclavage et de ses vestiges, depuis les événements de Charlottesville jusqu’à la polémique autour de Colbert (auteur du Code Noir), en passant par la vente aux enchères de migrants africains, oblige à la responsabilité les décideurs français. Le vivre-ensemble ne peut reposer ni sur l’amnésie, ni sur l’occultation, encore moins sur les inégalités de traitement mémoriel. Le soutien du député Prud’homme, à la position défendue par Mémoires & Partages depuis 2009, démontre un commencement de prise de conscience d’une nouvelle étape de la lutte contre les injustices et les racismes tout autant que d’un nécessaire partage des mémoires. Quant à la mémoire pétrifiée de Bordeaux, la vitalité de sa société civile est la garante la plus sure de la réparation et de la résilience « .

Ce 19 février, à 11h30, c’est la dernière étape de la campagne sur les rues de négriers.

Aprés La Rochelle, LeHavre et Nantes, c’est sur la Place Lainé  à Bordeaux que Mémoires & Partages va à la rencontre des élus et résidents de Bordeaux.

La Ville de Nantes vient d’annoncer sa décision d’édifier des panneaux sur les rues de négriers. 


*VOUS VOULEZ  PARTICIPER?

Si vous voulez participer, à la campagne, copier et envoyer le courrier ci-dessous, par mail ou papier, à votre maire.

LETTRE TYPE PLAIDOYER POUR UNE SIGNALÉTIQUE RESPECTUEUSE DES DROITS HUMAINS

(……………….………ville……………….…….), le …/……./ 2018.

Madame la maire / Monsieur le maire,

OBJET: Plaidoyer pour des panneaux explicatifs sur les rues de négriers et d’esclavagistes

Comme l’a reconnu à l’unanimité la loi du 10 mai 2001, l’esclavage et la traite des noirs étaient et restent des crimes contre l’Humanité. Pourtant, dans notre ville de …………, qui a pourtant mis en place de nombreuses actions pédagogiques autour de cette mémoire, les autorités laissent malgré tout persister des honneurs rendus aux négriers sous forme de nom de rues, de places et d’établissements.

Sensibilisé sur cette question par la campagne #expliquetaruedenégrier de l’association Mémoires & Partages, je m’adresse à vous pour demander que la ville se saisisse de cette problématique, et qu’un débat public soit ouvert sur ces honneurs générateurs de haine et de souffrances. Récemment la ville de New York a formé une commission pour les recenser et évaluer les actions à suivre.

Pour ma part, la moindre des réparations que l’on puisse exiger pour les victimes serait l’ajout, à des lieux bien choisis, de quelques plaques explicatives dans ces rues, pour rappeler la complexité de ces personnages éponymes. En effet, si ceux-ci ont souvent joué un rôle important pour la cité, raison pour laquelle ils passent à la postérité, ce sont également des criminels au regard de l’Humanité. Pourquoi dès lors ne pas profiter de cette occasion pour raconter cette histoire complexe et terrible ?

De plus, les livres et les musées, malgré leur nécessité, peuvent donner l’impression d’enfermer la mémoire des victimes l’esclavage, quand celle de leurs bourreaux s’affichent à jamais sur l’espace public, lieu de partage démocratique par excellence. Ce déséquilibre mémoriel, alors même qu’à titre de comparaison les rues Pétain sont toutes débaptisées, engendre des frustrations sur lesquelles certains n’hésiteront pas à jouer pour chercher à radicaliser des individus.

Aussi, pour que la mémoire des victimes puisse être vraiment honorée dans le quotidien de tous, sans avoir à attendre les commémorations du 10 mai ou les expositions, je souhaite que la mairie s’engage dans une démarche courageuse de mise à disposition visible d’explications concernant les aspects sombres (et plus uniquement les qualités) de certaines personnalités honorées sur l’espace public, afin que la signalétique urbaine retrouve plus de sens et d’humanité.

Vous remerciant de l’attention que vous voudrez bien accorder à ma demande, je vous prie d’agréer, Madame la maire / Monsieur le maire, l’expression de ma haute considération.

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